Les écoquartiers, fragments de la ville durable ? (2/3)
Les conséquences de la généralisation annoncée
Dans le premier épisode, nous nous intéressions à la conception d’un éco-quartier comme " espace réservé ". Dans ce second épisode, nous nous interrogeons sur les éventuelles conséquences de la généralisation annoncée des quartiers durables.
On peut s’interroger sur l’efficacité de ce type d’action. Initialement, les autorités locales pensaient que les éco-quartiers auraient un effet levier sur les politiques urbaines en général et sur la diffusion des technologies et pratiques durables. Cela était envisagé comme un véritable acte de rupture sensé remettre en cause la production traditionnelle de la ville. Mais aujourd’hui, avec la généralisation du concept, et sa vulgarisation, les éco-quartiers semblent même avoir un effet pervers dans la mesure où cela permet aux pouvoirs publics locaux de se dédouaner de ne pas mener d’autres types d’actions à l’échelle de la ville dans son ensemble. A peu de frais, (les surcoûts dans le bâti sont assumés par les futurs propriétaires), l’éco-quartier permet en effet de créer une image " durable " et consensuelle, et de mettre en avant un engagement municipal peu coûteux.
Or le vrai enjeu du développement urbain durable est celui de la transformation durable de la ville héritée déjà construite. Les projets urbains nouveaux peuvent facilement intégrer des normes techniques exigeantes (ce qui favorise en plus de nouvelles activités économiques spécialisées), mais il est plus délicat de changer la ville et de la mettre aux normes de l’urbain durable. Ainsi, même dans les villes pionnières en ce domaine, la diffusion au reste de la ville de cet urbanisme " durable " reste très limitée (ex. Fribourg en Brisgau). Les constructions existantes ne sont pas modifiées et les politiques de développement durables dans le reste de la ville sont beaucoup moins abouties.
Enfin, la définition même de l’éco-quartier et de son évaluation posent problème puisque les normes et les critères évoluent très rapidement dans ce domaine. La généralisation prévue par le Grenelle en France en est un symptôme : toutes les villes de plus de 100 000 habitants, ayant une croissance suffisante en termes de population devront s’en doter d’ici 2012. On passe ainsi de l’expérimentation à la généralisation, ce qui en fait un domaine de l’urbanisme qui devient de plus en plus classique. Cette pratique devient donc un incontournable du développement urbain durable alors que finalement ces effets restent marginaux car très localisés. L’éco-quartier est devenu un objet de communication (ou au mieux, de sensibilisation) relativement abordable, qui est modulable selon les exigences des pouvoirs publics et qui peut même être superposé a posteriori sur des opérations urbanistiques relativement traditionnelles (ex. Zone d’Aménagement Concerté de Rungis lancée en 2002 mais qui ne s’inscrit dans le paradigme du " durable " qu’en 2004). L’éco-quartier apparait alors aux pouvoirs locaux comme une solution miracle qui prendrait en compte tous les problèmes que pose la ville moderne. Or la duplication et l’extension de cette pratique très particulière ne sont pas évidentes.
A suivre...
Dans le premier épisode, nous nous intéressions à la conception d’un éco-quartier comme " espace réservé ". Dans ce second épisode, nous nous interrogeons sur les éventuelles conséquences de la généralisation annoncée des quartiers durables.
On peut s’interroger sur l’efficacité de ce type d’action. Initialement, les autorités locales pensaient que les éco-quartiers auraient un effet levier sur les politiques urbaines en général et sur la diffusion des technologies et pratiques durables. Cela était envisagé comme un véritable acte de rupture sensé remettre en cause la production traditionnelle de la ville. Mais aujourd’hui, avec la généralisation du concept, et sa vulgarisation, les éco-quartiers semblent même avoir un effet pervers dans la mesure où cela permet aux pouvoirs publics locaux de se dédouaner de ne pas mener d’autres types d’actions à l’échelle de la ville dans son ensemble. A peu de frais, (les surcoûts dans le bâti sont assumés par les futurs propriétaires), l’éco-quartier permet en effet de créer une image " durable " et consensuelle, et de mettre en avant un engagement municipal peu coûteux.
Or le vrai enjeu du développement urbain durable est celui de la transformation durable de la ville héritée déjà construite. Les projets urbains nouveaux peuvent facilement intégrer des normes techniques exigeantes (ce qui favorise en plus de nouvelles activités économiques spécialisées), mais il est plus délicat de changer la ville et de la mettre aux normes de l’urbain durable. Ainsi, même dans les villes pionnières en ce domaine, la diffusion au reste de la ville de cet urbanisme " durable " reste très limitée (ex. Fribourg en Brisgau). Les constructions existantes ne sont pas modifiées et les politiques de développement durables dans le reste de la ville sont beaucoup moins abouties.
Enfin, la définition même de l’éco-quartier et de son évaluation posent problème puisque les normes et les critères évoluent très rapidement dans ce domaine. La généralisation prévue par le Grenelle en France en est un symptôme : toutes les villes de plus de 100 000 habitants, ayant une croissance suffisante en termes de population devront s’en doter d’ici 2012. On passe ainsi de l’expérimentation à la généralisation, ce qui en fait un domaine de l’urbanisme qui devient de plus en plus classique. Cette pratique devient donc un incontournable du développement urbain durable alors que finalement ces effets restent marginaux car très localisés. L’éco-quartier est devenu un objet de communication (ou au mieux, de sensibilisation) relativement abordable, qui est modulable selon les exigences des pouvoirs publics et qui peut même être superposé a posteriori sur des opérations urbanistiques relativement traditionnelles (ex. Zone d’Aménagement Concerté de Rungis lancée en 2002 mais qui ne s’inscrit dans le paradigme du " durable " qu’en 2004). L’éco-quartier apparait alors aux pouvoirs locaux comme une solution miracle qui prendrait en compte tous les problèmes que pose la ville moderne. Or la duplication et l’extension de cette pratique très particulière ne sont pas évidentes.
A suivre...
Commentaires
1 02 février 2012 à 11h14 par Architecte de Pau
Excellant cette image, sa résume tout !