Quand TIC rime avec « démocratic » et « participatic »
Les technologies de l’information et de la communication sont aujourd’hui des outils véritablement au service de la participation et de la mobilisation citoyenne. A condition toutefois de ne pas en faire des placebos digitaux qui se substitueraient par facilité de mise en œuvre aux autres formes classiques de démocratie participative. L’élaboration collective de la nouvelle constitution islandaise est un exemple récent de démocratie citoyenne utilisant le web 2.0. Quels enseignements simples pour mobiliser et impliquer les habitants dans la mise en œuvre d’un développement et un aménagement durable de nos villes et quartiers ?
Le site web, une solution pour informer
Commençons d’abord par un constat, les élus de tout bord sont souvent frileux et peu ouverts à une forte participation citoyenne dans la co-production des solutions d’aménagement des villes. Comme le rappelle La Revue Durable dans son dossier sur les écoquartiers (N°45 : avril-mai-juin 2012, c’est le dernier numéro distribué en kiosque. Dorénavant pour réduire son empreinte carbone, la revue sera diffusée exclusivement sur abonnement) « quasiment toutes les opérations sont essentiellement descendantes, du haut vers le bas, des sachants vers les non-sachants, des experts et des professionnels de la ville vers les profanes qui n’ont trop souvent qu’à subir ce que l’on leur propose et à s’adapter. »
Les élus ont assez vite compris l’intérêt de la diffusion d’information descendante via les simples sites internet. C’est simple, peu coûteux, cela permet de toucher à priori beaucoup de monde, surtout une cible jeune, active et familiarisée avec le web. Ce processus de mise à disposition d’information la plus exhaustive possible est certes nécessaire mais pas suffisante. Il est indispensable pour faire comprendre les enjeux et partager les objectifs de rendre accessible les informations. En plagiant le titre du dossier de La Revue Durable, je suis convaincu que l’on peut « faire du web social et collaboratif un lieu propice à l’expression de la citoyenneté » et un moyen au service de la mobilisation et de l’implication des habitants dans le processus de changement de comportement au regard des enjeux du développement durable.
L’Islande, un volcan s’éteint, le web s’enflamme
L’exemple de l’Islande est éclairant et instructif. Octobre 2008. La crise financière. Moins d’un mois après la faillite de Lehmans Brothers, elle frappe l’Islande et les Islandais de plein fouet. Cette crise, personne ne l’avait vue venir. Les Islandais étaient pourtant très fiers de leurs performances financières. En une semaine, le pays était exsangue. Plus de liquidité, effondrement complet de la devise islandaise, la couronne, un nombre impressionnant de ménages endettés. Bref, un cataclysme pour ce petit état insulaire de l’Océan Atlantique Nord, situé entre le Groenland et l’Ecosse, rattaché culturellement et historiquement à l'Europe, d’une superficie de 103 000 km2 avec une population d'environ 320 000 habitants. Capitale, et plus grande ville, Reykjavik.
Avant la crise économique de 2008, l'Islande était au premier rang des pays les plus développés au monde selon l'indice de développement humain (IDH). La crise a bouleversé le paysage politique national : la gauche est devenue majoritaire à l'Assemblée et de multiples partis ont émergé. Récemment, trois nouveaux partis ont été créés, ce qui montre combien la population est désorientée, combien elle est déçue par la majorité en place, alors que celle-ci est en passe de sortir le pays de la crise dans de bien meilleures conditions que prévu... en agissant de concert sur tous les leviers possibles et imaginables (nationalisation et recapitalisation des banques, création de banques de dépôt, soutien du FMI, dévaluation de la couronne, signature du Pacte de stabilité…). La population, elle, est sortie dans la rue pour réclamer le départ de David Oddsson, alors président de la Banque centrale islandaise, ancien premier ministre de 1991 à 2004, c'est lui qui avait organisé la libéralisation du pays. Oddsson est limogé en février 2009, mais les revendications des manifestants continuent et s'étendent progressivement à l'ensemble du gouvernement. Un vent de fronde secoue le pays.
Une nouvelle constitution pour sortir le pays de l’enfer
Face à ce contexte, le gouvernement décide alors de réformer leur constitution, considérée comme inadaptée à la situation que venait de connaître l’Islande. Il décide de le faire pour et avec les citoyens en mettant en place un dispositif digital de concertation unique en son genre. Pour la première fois au monde, la refonte de la constitution d’un pays s’est faite par la consultation de tous les Islandais grâce au web et aux médias sociaux qui ont été utilisés pour recueillir les avis et les commentaires.
Dans un premier temps, le 6 novembre 2009, ce sont près de 950 citoyens islandais qui sont tirés au sort pour participer à un forum de discussion sur la future Constitution.
A partir des premiers résultats du forum citoyen, le Conseil constitutionnel en avril 2011 démarre la rédaction de la future constitution.
Les réseaux sociaux au service de la concertation
Parallèlement, un dispositif complet digital est déployé : site internet, page facebook et compte Twitter où sont postés quasiment en temps réel, les comptes rendus, les propositions faites. Les citoyens débattent et dialoguent sur le site et les pages facebook du Conseil constitutionnel. Chaque jeudi : les réunions de travail du Conseil sont diffuées sur You Tube en direct, les photos des séances postées sur Flickr. Inimaginable ailleurs ! En moins de trois mois, dès fin juillet 2011, la Constitution provisoire est soumise à référendum.
Un succès mitigé pour la participation citoyenne...
Le fait d’avoir associé en amont un grand nombre de citoyens pour la recherche d’idées (le crowdsourcing), la mise à disposition de l’information, l’interactivité offerte par le web, tout cela a généré au final des commentaires élogieux des internautes sur le travail des Constituants. Toutefois, malgré le dispositif ambitieux de mobilisation et de consultation citoyenne, seuls 3600 commentaires environ ont été recueilli (1,1% de la population islandaise) et 370 propositions ont pu être traitées (0,1 % de la population). Pire encore, le taux de participation de désignation du nouveau Parlement constitutionnel n’a été que de 35 % dans un pays où les scrutins approchent habituellement les 90 %. Le quasi tout numérique a montré ses limites en termes de démocratie participative...
Un nouveau graal : le SoLoMoTo
Et pourtant, la stratégie mise en œuvre pour l’élaboration participative de la constitution respectait bien le nouveau graal digital des publicitaires pour mobiliser et impliquer : le SoLoMo, expression inventé par Loïc Le Meur, blogeur français, fin 2011. So pour social, Lo pour local, Mo pour mobile. En clair, si vous voulez aujourd’hui avoir de l’impact pour faire savoir, convaincre, faire agir, il est nécessaire de déployer une stratégie digitale qui utilise prioritairement les réseaux sociaux d’une part, les actions locales et de proximité au plus près de la cible d’autre part et enfin les services mobiles. A cette méthode, je ne peux que vous inviter pour plus d’efficacité à la compléter par To. Elle deviendrait SoLoMoTo, To pour toucher du doigt, appréhender réellement les problématiques, aller au contact des citoyens, les amener physiquement sur le terrain, les faire échanger en groupe...
Et une sortie de crise en vue pour l’Islande
Néanmoins, cela a été un véritable outil d’aide à la décision dans le processus de choix politique pour le moins utile et efficace au gouvernement islandais. À l'heure où les plans d'aide de l'Union européenne à la Grèce se multiplient, l'Islande, premier pays frappé par la crise financière, se relève. Sa croissance devrait afficher cette année 2012 plus de 3 %, le taux de chômage est retombé à 7 %, l'endettement des ménages s'est contracté et la balance commerciale est positive.
Au-delà des TIC, quelle éthique pour une nouvelle ville durable ?
L’exemple islandais illustre plutôt bien combien les TIC peuvent être au service de la démocratie participative et de la coopération. A condition toutefois de ne pas en faire le seul outil au service de la co-production des projets des villes durables de demain. La réussite des projets d’aménagement urbains, et notamment les éco-quartiers, passe nécessairement par une vraie concertation de toutes les parties prenantes concernées. Anne-Sophie Novel et Stéphane Riot, co-auteurs de « Vive la co-révolution pour une société collaborative – Collection manifestô – Editions Alternatives » l’affirment d’ailleurs : « les avantages de la collaboration radicale au service du développement durable sont multiples : au-delà des aspects propres au fonctionnement en réseaux que sont le partage d’expériences, de pratiques, l’échange de conseils et de contacts, elle permet d’associer les parties en présence dans une vraie démarche innovante ». Ils rajoutent par ailleurs que « la dimension radicale de la collaboration doit justement servir cette part d’engagement collectif pour le bien commun ».
Cette coopération passe par une concertation qui ne soit pas une simple consultation pour associer les citoyens aux grandes orientations de la ville durable. Les enjeux sont grands. Déjà les trois quart des français habitent en ville. D’après les études, en 2050, 80 % des 70 millions d’habitants que comptera l’hexagone, vivront en ville. Déjà les villes sont responsables d’environ 70 % de la consommation mondiale d’énergie. La transition écologique et sociale des villes a commencé. Comment arriver à faire mieux vivre ensemble plus de monde avec moins de ressource tels sont quelques uns des enjeux de la ville durable de demain entre utopie, rêve et nécessité vitale !
Photos FlickR briansuda.
Le site web, une solution pour informer
Commençons d’abord par un constat, les élus de tout bord sont souvent frileux et peu ouverts à une forte participation citoyenne dans la co-production des solutions d’aménagement des villes. Comme le rappelle La Revue Durable dans son dossier sur les écoquartiers (N°45 : avril-mai-juin 2012, c’est le dernier numéro distribué en kiosque. Dorénavant pour réduire son empreinte carbone, la revue sera diffusée exclusivement sur abonnement) « quasiment toutes les opérations sont essentiellement descendantes, du haut vers le bas, des sachants vers les non-sachants, des experts et des professionnels de la ville vers les profanes qui n’ont trop souvent qu’à subir ce que l’on leur propose et à s’adapter. »
Les élus ont assez vite compris l’intérêt de la diffusion d’information descendante via les simples sites internet. C’est simple, peu coûteux, cela permet de toucher à priori beaucoup de monde, surtout une cible jeune, active et familiarisée avec le web. Ce processus de mise à disposition d’information la plus exhaustive possible est certes nécessaire mais pas suffisante. Il est indispensable pour faire comprendre les enjeux et partager les objectifs de rendre accessible les informations. En plagiant le titre du dossier de La Revue Durable, je suis convaincu que l’on peut « faire du web social et collaboratif un lieu propice à l’expression de la citoyenneté » et un moyen au service de la mobilisation et de l’implication des habitants dans le processus de changement de comportement au regard des enjeux du développement durable.
L’Islande, un volcan s’éteint, le web s’enflamme
L’exemple de l’Islande est éclairant et instructif. Octobre 2008. La crise financière. Moins d’un mois après la faillite de Lehmans Brothers, elle frappe l’Islande et les Islandais de plein fouet. Cette crise, personne ne l’avait vue venir. Les Islandais étaient pourtant très fiers de leurs performances financières. En une semaine, le pays était exsangue. Plus de liquidité, effondrement complet de la devise islandaise, la couronne, un nombre impressionnant de ménages endettés. Bref, un cataclysme pour ce petit état insulaire de l’Océan Atlantique Nord, situé entre le Groenland et l’Ecosse, rattaché culturellement et historiquement à l'Europe, d’une superficie de 103 000 km2 avec une population d'environ 320 000 habitants. Capitale, et plus grande ville, Reykjavik.
Avant la crise économique de 2008, l'Islande était au premier rang des pays les plus développés au monde selon l'indice de développement humain (IDH). La crise a bouleversé le paysage politique national : la gauche est devenue majoritaire à l'Assemblée et de multiples partis ont émergé. Récemment, trois nouveaux partis ont été créés, ce qui montre combien la population est désorientée, combien elle est déçue par la majorité en place, alors que celle-ci est en passe de sortir le pays de la crise dans de bien meilleures conditions que prévu... en agissant de concert sur tous les leviers possibles et imaginables (nationalisation et recapitalisation des banques, création de banques de dépôt, soutien du FMI, dévaluation de la couronne, signature du Pacte de stabilité…). La population, elle, est sortie dans la rue pour réclamer le départ de David Oddsson, alors président de la Banque centrale islandaise, ancien premier ministre de 1991 à 2004, c'est lui qui avait organisé la libéralisation du pays. Oddsson est limogé en février 2009, mais les revendications des manifestants continuent et s'étendent progressivement à l'ensemble du gouvernement. Un vent de fronde secoue le pays.
Une nouvelle constitution pour sortir le pays de l’enfer
Face à ce contexte, le gouvernement décide alors de réformer leur constitution, considérée comme inadaptée à la situation que venait de connaître l’Islande. Il décide de le faire pour et avec les citoyens en mettant en place un dispositif digital de concertation unique en son genre. Pour la première fois au monde, la refonte de la constitution d’un pays s’est faite par la consultation de tous les Islandais grâce au web et aux médias sociaux qui ont été utilisés pour recueillir les avis et les commentaires.
Dans un premier temps, le 6 novembre 2009, ce sont près de 950 citoyens islandais qui sont tirés au sort pour participer à un forum de discussion sur la future Constitution.
A partir des premiers résultats du forum citoyen, le Conseil constitutionnel en avril 2011 démarre la rédaction de la future constitution.
Les réseaux sociaux au service de la concertation
Parallèlement, un dispositif complet digital est déployé : site internet, page facebook et compte Twitter où sont postés quasiment en temps réel, les comptes rendus, les propositions faites. Les citoyens débattent et dialoguent sur le site et les pages facebook du Conseil constitutionnel. Chaque jeudi : les réunions de travail du Conseil sont diffuées sur You Tube en direct, les photos des séances postées sur Flickr. Inimaginable ailleurs ! En moins de trois mois, dès fin juillet 2011, la Constitution provisoire est soumise à référendum.
Un succès mitigé pour la participation citoyenne...
Le fait d’avoir associé en amont un grand nombre de citoyens pour la recherche d’idées (le crowdsourcing), la mise à disposition de l’information, l’interactivité offerte par le web, tout cela a généré au final des commentaires élogieux des internautes sur le travail des Constituants. Toutefois, malgré le dispositif ambitieux de mobilisation et de consultation citoyenne, seuls 3600 commentaires environ ont été recueilli (1,1% de la population islandaise) et 370 propositions ont pu être traitées (0,1 % de la population). Pire encore, le taux de participation de désignation du nouveau Parlement constitutionnel n’a été que de 35 % dans un pays où les scrutins approchent habituellement les 90 %. Le quasi tout numérique a montré ses limites en termes de démocratie participative...
Un nouveau graal : le SoLoMoTo
Et pourtant, la stratégie mise en œuvre pour l’élaboration participative de la constitution respectait bien le nouveau graal digital des publicitaires pour mobiliser et impliquer : le SoLoMo, expression inventé par Loïc Le Meur, blogeur français, fin 2011. So pour social, Lo pour local, Mo pour mobile. En clair, si vous voulez aujourd’hui avoir de l’impact pour faire savoir, convaincre, faire agir, il est nécessaire de déployer une stratégie digitale qui utilise prioritairement les réseaux sociaux d’une part, les actions locales et de proximité au plus près de la cible d’autre part et enfin les services mobiles. A cette méthode, je ne peux que vous inviter pour plus d’efficacité à la compléter par To. Elle deviendrait SoLoMoTo, To pour toucher du doigt, appréhender réellement les problématiques, aller au contact des citoyens, les amener physiquement sur le terrain, les faire échanger en groupe...
Et une sortie de crise en vue pour l’Islande
Néanmoins, cela a été un véritable outil d’aide à la décision dans le processus de choix politique pour le moins utile et efficace au gouvernement islandais. À l'heure où les plans d'aide de l'Union européenne à la Grèce se multiplient, l'Islande, premier pays frappé par la crise financière, se relève. Sa croissance devrait afficher cette année 2012 plus de 3 %, le taux de chômage est retombé à 7 %, l'endettement des ménages s'est contracté et la balance commerciale est positive.
Au-delà des TIC, quelle éthique pour une nouvelle ville durable ?
L’exemple islandais illustre plutôt bien combien les TIC peuvent être au service de la démocratie participative et de la coopération. A condition toutefois de ne pas en faire le seul outil au service de la co-production des projets des villes durables de demain. La réussite des projets d’aménagement urbains, et notamment les éco-quartiers, passe nécessairement par une vraie concertation de toutes les parties prenantes concernées. Anne-Sophie Novel et Stéphane Riot, co-auteurs de « Vive la co-révolution pour une société collaborative – Collection manifestô – Editions Alternatives » l’affirment d’ailleurs : « les avantages de la collaboration radicale au service du développement durable sont multiples : au-delà des aspects propres au fonctionnement en réseaux que sont le partage d’expériences, de pratiques, l’échange de conseils et de contacts, elle permet d’associer les parties en présence dans une vraie démarche innovante ». Ils rajoutent par ailleurs que « la dimension radicale de la collaboration doit justement servir cette part d’engagement collectif pour le bien commun ».
Cette coopération passe par une concertation qui ne soit pas une simple consultation pour associer les citoyens aux grandes orientations de la ville durable. Les enjeux sont grands. Déjà les trois quart des français habitent en ville. D’après les études, en 2050, 80 % des 70 millions d’habitants que comptera l’hexagone, vivront en ville. Déjà les villes sont responsables d’environ 70 % de la consommation mondiale d’énergie. La transition écologique et sociale des villes a commencé. Comment arriver à faire mieux vivre ensemble plus de monde avec moins de ressource tels sont quelques uns des enjeux de la ville durable de demain entre utopie, rêve et nécessité vitale !
Photos FlickR briansuda.
Commentaires
1 05 août 2023 à 13h34 par comparer forfaits
Le fait d’avoir associé en amont un grand nombre de citoyens pour la recherche d’idées (le crowdsourcing), la mise à disposition de l’information, l’interactivité offerte par le web, tout cela a généré au final des commentaires élogieux des internautes sur le travail des Constituants.