La loi ALUR fait renaître la coopérative d’habitants
Ce 12 avril 2014, réunie dans la salle commune flambant neuve de la première coopérative d’habitants de France, l’Assemblée Générale de l’association Habicoop affichait la fatigue souriante des longs combats victorieux. Le 27 mars, le Journal Officiel avait enfin publié une loi redonnant un statut adapté aux coopératives d’habitants, par modification du Code de la Construction et de l’Habitat. On a peu parlé de cette mesure de la loi ALUR ; il s’agit pourtant peut-être de la plus révolutionnaire…
Des ménages peuvent maintenant se rassembler, quels que soient leurs niveaux de revenus, et monter ensemble un projet d’immeuble (ou de maisons…), où chacun aura son logement et partagera des espaces communs avec ses voisins. La loi crée pour faciliter cela deux possibilité nouvelles : la société d’attribution et d’autopromotion, à géométrie variable (sorte de copropriété ou de SCI adaptée à l’habitat participatif), et la coopérative d’habitants (où chacun est détenteur de parts de la coopérative qui détient l’immeuble, mais jamais propriétaire de son logement, social ou non). La coopérative permet de sortir les biens concernés de la spéculation : la loi autorise un coopérateur sortant à se faire rembourser ses parts sociales plus cher que le prix auquel il les a achetées, mais seulement pour tenir compte de l’inflation, sans plus-value possible.
Il devient donc possible, à un prix durablement abordable, de concilier densité et qualité de vie (jardin commun, grande salle partagée, atelier de bricolage, chambres d’amis…) sans être contraint par un règlement de copropriété sclérosant. Développées en masse dans les agglomérations, les coopératives d’habitants offriront une alternative sérieuse à la tentation périurbaine. C’est déjà la cas en Suisse, en Allemagne, en Turquie, au Québec… A Zürich, dans un écoquartier récent, 100 % des logements sont prévus en coopérative. Notons au passage que cet écoquartier ne proposera aucune place de stationnement à ses habitants, seulement de l’autopartage !
Enfin, l’outil de financement des coopératives d’habitants reste à créer. La loi crée un lien juridique nouveau entre la coopérative est ses coopérateurs-habitants : le contrat coopératif. Celui-ci se substituera donc aux baux locatifs auxquelles les rares coopératives d’habitants actuelles recourent faute de mieux. Il s’agit entre autre d’éviter qu’un logement soit à attribuer de façon trop rigide à telle ou telle catégorie de revenu (il existe 5 catégories de locataires et de prêts aidés ou non, ce qui complique grandement la création des coopératives et leur gestion). A terme, il est souhaitable de proposer deux types de coopératives. L’un, locatif, permettrait à chaque habitant de n’apporter que très peu d’argent à son entrée dans les lieux puis de louer à bas prix tout de même grâce à un emprunt collectif de très longue durée (de tels prêts existent et fonctionnent en Suisse, mais pas encore en France). L’autre type serait la coopérative « à capitalisation » : chaque ménage aciérerait chaque mois un peu plus de parts sociales, jusqu’à détenir une valeur correspondant au prix de revient du logement qu’il occupe. Il faudrait pour cela que les coopératives puissent se ré endetter pour pouvoir rembourser ces parts acquisitives lors du départ du ménage concerné.
La promulgation de la loi ne représente donc qu’une importante victoire d’étape, qui en appelle d’autres, réglementaires, financières et bancaires. Mais un mouvement de fond est amorcé, et rien n’est plus fort qu’une idée dont l’heure est venue.
Des ménages peuvent maintenant se rassembler, quels que soient leurs niveaux de revenus, et monter ensemble un projet d’immeuble (ou de maisons…), où chacun aura son logement et partagera des espaces communs avec ses voisins. La loi crée pour faciliter cela deux possibilité nouvelles : la société d’attribution et d’autopromotion, à géométrie variable (sorte de copropriété ou de SCI adaptée à l’habitat participatif), et la coopérative d’habitants (où chacun est détenteur de parts de la coopérative qui détient l’immeuble, mais jamais propriétaire de son logement, social ou non). La coopérative permet de sortir les biens concernés de la spéculation : la loi autorise un coopérateur sortant à se faire rembourser ses parts sociales plus cher que le prix auquel il les a achetées, mais seulement pour tenir compte de l’inflation, sans plus-value possible.
Il devient donc possible, à un prix durablement abordable, de concilier densité et qualité de vie (jardin commun, grande salle partagée, atelier de bricolage, chambres d’amis…) sans être contraint par un règlement de copropriété sclérosant. Développées en masse dans les agglomérations, les coopératives d’habitants offriront une alternative sérieuse à la tentation périurbaine. C’est déjà la cas en Suisse, en Allemagne, en Turquie, au Québec… A Zürich, dans un écoquartier récent, 100 % des logements sont prévus en coopérative. Notons au passage que cet écoquartier ne proposera aucune place de stationnement à ses habitants, seulement de l’autopartage !
UNE LOI POURTANT IMPARFAITE
Nuançons cet enthousiasme circonstanciel par une déception. Malgré plusieurs tentatives des sénateurs pour relayer cette demande de la société civile, la loi prévoit de plafonner le prix de rachat des parts sociales d’un sortant par la coopérative, mais beaucoup moins clairement le prix de vente des mêmes parts à un nouvel habitants. Dans les faits, ce ne sera pas un problème : une vente sous-entend des frais de notaire rédhibitoire, tout le monde aura donc recours au remboursement. Mais il sera plus difficile d’argumenter auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations pour qu’elle crée un prêt aidé dédié aux coopératives, comme auprès des collectivités pour qu’elles acceptent de garantir ces emprunts. Comment fonder, en effet, ces aides publiques sur une sortie de la spéculation que la loi encadre imparfaitement ? A la prochaine occasion qu’offrira le calendrier parlementaire, il faudra donc remonter au filet pour obtenir ce plafonnement ferme du prix de cession des parts sociales… en espérant que le Conseil constitutionnel n’y voit pas une entorse à la sacro-sainte propriété privée. On peut en effet supposer que c’est ce risque constitutionnel qui a effrayé la Ministre et la Rapporteur du Projet de Loi à l’Assemblée.QUE CHANGE LA LOI ?
En attendant, cette loi promulguée ne sera rien tant qu’elle ne sera pas suivie des décrets d’application. Les associations restent donc mobilisées, dorénavant auprès du cabinet de Sylvia Pinel. Les enjeux sont en effet de taille : outre la sortie de la spéculation précédemment évoquée, la loi ALUR permettra d’acquérir des parts sociales d’une société d’habitat participatif non seulement par un apport en capital, mais aussi par un apport travail. Et, fait nouveau, les parts acquise grâce à ces « apports en industrie » seront cessibles, c’est à dire qu’elles auront la même valeur que celles qui auront été achetées. Un groupe de travail entre le Ministère et les associations doit préparer le décret finalisant cette avancée historique. D’autres décrets préciseront les conditions dans lesquels les bailleurs sociaux pourront s’impliquer dans les projets, les garanties financières imposées pour réaliser un immeuble en coopérative d’habitant ou encore les contours des « organismes fonciers solidaires » que crée la loi. L’objet de ces derniers sera de mettre à disposition du foncier, bâti ou non, pour la production de logements abordables, en location ou en accession à la propriété, tout en préservant leur accessibilité économique sur le très long terme, au fil des locations ou des reventes. Là encore, un groupe de travail avec les associations doit préciser ce que seront ces « Community Land Trust » à la française. Faciliter le démembrement de la propriété entre le foncier et le bâti rendraient un grand services aux projets faisant face à un problème de manque d’apport en argent.Enfin, l’outil de financement des coopératives d’habitants reste à créer. La loi crée un lien juridique nouveau entre la coopérative est ses coopérateurs-habitants : le contrat coopératif. Celui-ci se substituera donc aux baux locatifs auxquelles les rares coopératives d’habitants actuelles recourent faute de mieux. Il s’agit entre autre d’éviter qu’un logement soit à attribuer de façon trop rigide à telle ou telle catégorie de revenu (il existe 5 catégories de locataires et de prêts aidés ou non, ce qui complique grandement la création des coopératives et leur gestion). A terme, il est souhaitable de proposer deux types de coopératives. L’un, locatif, permettrait à chaque habitant de n’apporter que très peu d’argent à son entrée dans les lieux puis de louer à bas prix tout de même grâce à un emprunt collectif de très longue durée (de tels prêts existent et fonctionnent en Suisse, mais pas encore en France). L’autre type serait la coopérative « à capitalisation » : chaque ménage aciérerait chaque mois un peu plus de parts sociales, jusqu’à détenir une valeur correspondant au prix de revient du logement qu’il occupe. Il faudrait pour cela que les coopératives puissent se ré endetter pour pouvoir rembourser ces parts acquisitives lors du départ du ménage concerné.
La promulgation de la loi ne représente donc qu’une importante victoire d’étape, qui en appelle d’autres, réglementaires, financières et bancaires. Mais un mouvement de fond est amorcé, et rien n’est plus fort qu’une idée dont l’heure est venue.
Crédit photo : ©thinkstock