Dans cette série d’articles consacrée aux interactions entre les NTIC et l’urbanisme durable, nous avons pu constater que les outils numériques sont mobilisables dans des temporalités différenciées, permettant d’imaginer des "éco-quartiers 2.0", qui utiliseraient les nouvelles technologies pour favoriser la cohésion sociale, la démocratie locale, l’épanouissement individuel. Ainsi, en amont d’un projet urbain, la concertation peut s’imprégner des NTIC pour être plus effective (que ce soit à travers la réalité augmentée, ou la création de sites Internet interactifs de type web 2.0). Ensuite, nous avons étudié les possibilités de programmation sociale et économique, à travers une analyse des EPN (espaces publics numériques, démarche " NetPublic ") et des espaces de co-working, deux équipements dont les objectifs peuvent s’inscrire dans le cadre d’actions en faveur du développement durable (épanouissement des êtres humains à travers l’accès aux mêmes savoirs, aux mêmes infrastructures, rationalisation des déplacements domicile-travail à travers le " télé-travail ", etc.).
Il ne nous reste donc plus qu’à nous intéresser à l’aval du projet, et à l’intérêt de mobiliser les NTIC sur un processus de long-terme, notamment pour construire et maintenir le lien social.

Réseaux sociaux solidaires : une reconnexion à la vie de quartier

" Je propose de venir nourrir votre chat ou arroser vos plantes ", " je propose de la compagnie pour personnes âgées ou dépendantes " ou même " je propose une TV à prêter pour une soirée " peut-on lire sur ma-residence.fr, une fois renseigné son lieu d’habitation. Certaines entités publiques viennent même y annoncer leurs réunions, comme le Conseil de Quartier de la ville d’Evry.
Ainsi, depuis 2007, le réseau social localisé s’est fixé comme objectif de " mettre Internet au service du vivre ensemble et des relations de solidarité entre habitants d’une même ville, d’un même quartier, d’une même rue, tous ces liens abîmés par des décennies de vie sans convivialité ".  De nombreux autres réseaux sociaux de proximité mobilisent le concept : ainsi, Peuplade, " le site qui vous relie à votre quartier et à ses habitants " ; Voisineo, qui invite à la création de véritables " Communautés de Quartier " ; et l’héritier des initiatives « Fête des Voisins », Voisinssolidaires (" les bons côtés d’être à côté ", qui propose, sur son site Internet, des outils pour organiser l’entraide de proximité.
Pourquoi un tel engouement, et quel intérêt pour l’éco quartier 2.0. ?
Un réseau social solidaire, c’est un peu le FaceBook collectif du quartier, la dimension " échanges " en plus : on y vient proposer des services, échanger les bons plans des commerces de proximité, annoncer un évènement, organiser un repas de quartier, etc. Un système similaire aux accorderies, dont nous vous parlions déjà sur eco-quartiers.fr, avec une dimension identitaire plus forte : dès lors, le réseau social devient prétexte à la mise en place d’une plateforme web de solidarités locales d’échanges de service, basée sur le volontariat et l’implication des usagers du quartier, avec un objectif fondamental de création de lien social. L’échelle de l’éco-quartier est pertinente pour mettre en place de tels dispositifs, d’autant plus lorsque la mixité sociale est une ambition politique forte sur le projet urbain : le réseau solidaire permet ainsi de faire vivre le " lien social " sur le long-terme, dans une démarche largement implicative, à une époque où l’on parle plus de délitement que de convivialité.

En conclusion, ce que nous avons intitulé, tout au long de cette étude, " éco-quartier 2.0 ", peut être défini comme un quartier durable qui se saisit des ressources numériques comme d’outils au service de la cohésion sociale et de la performance socio-économique, dans un processus de création de valeur urbaine sur toutes les phases du projet. Il s’agit de s’affranchir du risque majeur auquel on peut faire face avec l’usage des NTIC dans l’espace public, la gadgetisation du lieu de vie, par une approche basée sur l’habitant. Revenir, en quelque sorte, aux fondamentaux du développement urbain durable.